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La RDC risque de compromettre sa souveraineté sur ses minéraux avec l’initiative de paix de Trump (expert)

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le président américain, Donald Trump, avec le ministre des Affaires étrangères rwandais, Olivier Nduhungirehe, et son homologue congolaise, Thérèse Kayikwamba Wagner, dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche, le 27 juin 2025. ©Reuters

Sous l’apparence d’un engagement pour la paix, les États-Unis de Trump semblent instrumentaliser le conflit entre la République démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda pour servir des intérêts géostratégiques et économiques.

En s’autoproclamant artisan de la paix, Trump cherche avant tout à sécuriser l’accès américain aux ressources minières sensibles de la RDC, avec une approche qui mélange de chantage diplomatique et l'exploitation néocoloniale, illustrant une vision opportuniste et cynique de la paix, transformée en levier de domination économique dans un monde où le colonialisme se pare désormais d’un masque de coopération.  

En effet, après la première réunion du Comité conjoint de suivi de l’accord de paix, tenue jeudi 31 juillet à Washington, les deux pays passent à l’économie. Ce 1er août, Kinshasa et Kigali ont paraphé l’énoncé des principes du Cadre d’intégration économique régionale. 

C’est le département d’État américain qui a annoncé samedi que le Rwanda et la RDC se sont entendus sur les grandes lignes d’un cadre d’intégration économique régionale, dans le cadre de leur accord de paix.
Un accord de paix signé en juin visait à mettre fin à des décennies de conflit dans l’est de la RDC. Cet accord a été supervisé par Washington, qui cherche à accroître son accès aux vastes ressources minérales de la région.

Le « cadre d’intégration économique » paraphé vendredi fait partie de cet accord de paix, selon le département d’État américain.

Il est conçu, conformément à l’accord, pour introduire une plus grande transparence dans les chaînes d’approvisionnement des minéraux critiques tels que le coltan et le lithium, et devrait être effectif d’ici la fin septembre.

En effet, l’administration Trump a été à la tête d’une initiative de paix ambitieuse, mais controversée, visant à mettre fin au conflit de longue date dans l’est de la République démocratique du Congo, qui a également impliqué le Rwanda voisin.

Ses efforts de médiation ne sont pas une surprise, car la RD Congo – une nation au cœur de l’Afrique – est dotée de richesses minérales dont les États-Unis ont besoin pour alimenter les révolutions de l’informatique, et maintenant de l’IA (intelligence artificielle), mais dont une grande partie va actuellement à la Chine.         

Le directeur exécutif de la World Peace Foundation, basée aux États-Unis, le professeur Alex de Waal, a déclaré à la BBC que l’administration Trump promouvait « un nouveau modèle de consolidation de la paix, combinant une performance populiste avec la conclusion d’accords commerciaux ».

« Trump a également agi de la même manière en Ukraine. Il veut s’enrichir pour renforcer sa position politique et sécuriser les minerais qui servent les intérêts des États-Unis », a déclaré le professeur De Waal.

Le professeur De Waal a déclaré que cela pourrait également se produire dans d’autres États touchés par des conflits comme le Soudan, où l’administration Trump, ainsi que des pays arabes comme l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Égypte, devrait s’impliquer dans des efforts de médiation après l’échec des initiatives précédentes.

Mais le professeur Hanri Mostert, professeur de droit minier à l’Université du Cap, en Afrique du Sud, a déclaré à la BBC que la RD Congo « risquait de compromettre sa souveraineté sur ses minéraux ».

La RDC pourrait se retrouver prisonnière d’accords pendant des années, en échange de vagues garanties de sécurité, a-t-elle déclaré

Le département d’État américain a déclaré en 2023 que la RD Congo disposait de réserves minérales estimées à 25 000 milliards de dollars (21 200 milliards de livres sterling).

Cela comprenait le cobalt, le cuivre, le lithium, le manganèse et le tantale, nécessaires à la fabrication des composants électroniques utilisés dans les ordinateurs, les véhicules électriques, les téléphones portables, les éoliennes et le matériel militaire.

« Pendant combien de temps la RDC devra-t-elle céder son cobalt aux investisseurs américains ? 20 ou 50 ans ? Quel est le prix de la paix ? » a demandé le professeur Mostert.

Le groupe rebelle M23 a lancé une offensive majeure au début de cette année, s’emparant de vastes zones de l’est de la RDC et faisant passer en contrebande des minéraux à travers la frontière vers le Rwanda, ont indiqué des experts de l’ONU dans un rapport publié plus tôt ce mois-ci.

Les minerais ont ensuite été mélangés à la production rwandaise, et « leurs exportations ultérieures vers les acteurs en aval ont atteint des niveaux sans précédent », ont ajouté les experts de l’ONU.

Le Rwanda nie les accusations de soutien au M23, malgré les preuves de l’ONU sur la présence de milliers de soldats rwandais en RDC.

« Nous obtenons, pour les États-Unis, une grande partie des droits miniers du Congo dans le cadre de cet accord », a déclaré M. Trump, avant la signature de l’accord de paix par les représentants des deux gouvernements le 27 juin 2025 à Washington.

Bram Verelst, chercheur en RDC au sein du groupe de réflexion de l’Institut d’études de sécurité basé en Afrique du Sud, a déclaré à la BBC que l’initiative américaine se déroulait en tandem avec une autre initiative menée par le Qatar.

Bien que le Rwanda nie soutenir le M23, il affirme vouloir éliminer « les FDLR, une milice issue des auteurs du génocide de 1994 au Rwanda, puis réfugiée en RDC ». Le Rwanda accuse l’armée congolaise de collaborer avec les FDLR.

« Pour le Rwanda, la neutralisation des FDLR est une condition préalable au retrait de ses forces, tandis que la RD Congo affirme que les deux doivent être réalisés simultanément », a souligné Onesphore Sematumba, analyste du groupe de réflexion International Crisis Group (ICG) basé en RDC, précisant que les médiateurs devraient trouver une solution, car ces questions ont conduit à l’échec des précédentes initiatives de paix.  

Quoi qu’il en soit, le président congolais Félix Tshisekedi a appelé samedi le parlement de la République démocratique du Congo (RDC) à adopter une résolution officielle sur la reconnaissance du « génocide » des Congolais commis dans l’est de la RDC.

Le groupe armé M23, soutenu par le Rwanda, et les troupes rwandaises se sont emparés en janvier de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, puis de Bukavu, chef-lieu de la province du Sud-Kivu, en février.

Les violences ont fait des milliers de morts, selon Kinshasa et l’ONU, et aggravé une crise humanitaire pour des centaines de milliers de déplacés.

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SOURCE: FRENCH PRESS TV