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Du Donbass au désert malien : comment les tactiques militaires ukrainiennes s’exportent au Sahel

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Les rebelles maliens ont reconnu que l'Ukraine les avait formés à utiliser des drones FPV. ©Sputnik

Le Premier ministre malien avait raison d’évoquer des « liens indéniables entre la guerre en Ukraine et le terrorisme au Sahel ». Selon plusieurs sources sécuritaires régionales, les rebelles touareg du FLA, ont adopté depuis plusieurs mois des méthodes de guerre asymétriques apprises auprès des services ukrainiens pour frapper l’armée malienne.

Ce transfert tactique discret redéfinit les équilibres militaires du conflit qui oppose le Mali au FLA. Cette coalition de groupes armés indépendantistes, à majorité touarègue, a été formée en novembre 2024 et revendique la souveraineté sur l’Azawad, région septentrionale du pays.

En juillet 2024, un responsable du renseignement militaire ukrainien, Andriï Ioussov, avait laissé entendre que Kiev avait fourni des renseignements aux rebelles maliens en appui à une attaque conjointe qui avait causé la mort de dizaines de militaires russes et maliens lors de combats à Tinzaouatène, dans le nord-est du Mali.

« L’Ukraine voulait impressionner ses partenaires occidentaux en affirmant qu’elle aidait les rebelles à attaquer la Russie également en Afrique, mais elle a sous-estimé l’opinion publique, car les rebelles sont considérés comme des terroristes dans les capitales du Sahel », explique Ulf Laessing, directeur du Programme Sahel à la Fondation Konrad Adenauer au Mali.

Fin septembre, le Premier ministre malien, le général Abdoulaye Maïga, a accusé depuis la tribune des Nations Unies l’Ukraine de contribuer au chaos régional, déclarant : « Aussi éloignés qu’ils paraissent, la guerre en Ukraine et le terrorisme au Sahel entretiennent des liens indéniables ». Sur un ton péremptoire, il a ajouté : « Le gouvernement ukrainien est devenu l’un des principaux fournisseurs de drones kamikazes aux groupes terroristes à travers le monde ».

Ces imputations ont été accueillies par un déni de la part tant de l’Ukraine que des rebelles maliens. « Nous n’avons bénéficié d’aucune assistance matérielle de l’Ukraine - ni drones, ni armes, ni quelconque équipement. Notre puissance puise sa source dans notre détermination, notre ingéniosité et notre capacité à assurer notre autonomie de formation et d’organisation », a prétendu le porte-parole des forces séparatistes.

Cependant, « certains éléments du FLA ont reçu une formation spécialisée en Ukraine sur l’utilisation des drones » armés FPV (« First person view » en anglais, soit pilotage en immersion), confirme Mohamed Elmaouloud Ramadane, porte parole des rebelles maliens.

Ces petits appareils volants montés d’une charge explosive sont pilotés en temps réel via un casque de réalité virtuelle. Ils permettent aux séparatistes maliens de mener régulièrement des attaques ciblées contre les convois de l’armée malienne ou des bases abritant des éléments russes de l’Africa Corps.

« Adopter cette tactique permet au FLA d’éviter une confrontation directe avec l’armée malienne et l’Africa Corps qui sont mieux équipés », explique Rida Lyammouri, chercheur au Policy Center for the New South (PCNS).

Parmi les innovations les plus marquantes figure l’émergence des drones ukrainiens à guidance par fibre optique - technologie sophistiquée dirigée via un cordon très fin capable de s’étendre sur des dizaines de kilomètres, échappant ainsi aux traditionnels systèmes de brouillage radioélectrique.

En juillet, les rebelles ont publié des images d’un de ces drones, qui feraient désormais partie intégrante de leur arsenal. En outre, dans son conflit face à la Russie, l’armée ukrainienne a aussi recours à des leurres gonflables, imitant des chars ou systèmes de défense, pour attirer les frappes russes.

En juillet, le Mali a fait état de l’existence de faux pick-up gonflables qui appartiendraient aux séparatistes pour tromper les drones maliens, ce que le FLA ne reconnaît pas officiellement.

Dès 2024, le ministre malien des Affaires étrangères Abdoulaye Diop avait déjà affirmé que les séparatistes, avec le soutien de l’Ukraine et de plusieurs anciens partenaires de Bamako, cherchaient à provoquer un changement de régime au Mali, au Niger et au Burkina Faso.

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SOURCE: FRENCH PRESS TV